PRIX FRANÇOIS FABIÉ 2014

lundi 26 mai 2014
par  Martine Astor

La Société d’Études Millavoises présente la 74ème édition
du
prix François Fabié

François Fabié est un poète aveyronnais. Il est né le 3 novembre 1846 au moulin familial de Roupeyrac (dans la commune de Durenque, dans l’Aveyron). Professeur de lettres, en 1872 il est nommé au Lycée de Toulon. En 1883, sa réussite à l’agrégation le conduit au lycée Charlemagne à Paris. Sa brillante carrière d’enseignant le mènera à la direction de l’école Colbert à Paris. A la retraite, en 1908, il achète une bastide à la Valette-du-Var, près de Toulon. C’est là que François Fabié s’éteint, à 82 ans, le 18 juillet 1928, dans sa maison des Troènes.

Son œuvre littéraire est importante : de nombreux recueils de poèmes (La poésie des bêtes, Le clocher, Ronces et lierres…), des pièces de théâtre (Molière et Montespan, comédie en un acte, Le Moulin de Roupeyrac, drame en vers et en quatre actes…), un roman ( Moulins d’autrefois), des contes …

Il faut revenir en 1922 pour retracer l’historique de ce prix littéraire.
François Fabié fut reçu à Millau le 6 août 1922 avec tous les honneurs de la ville. Il fut accueilli à la maison du Peuple par le docteur F. Bompaire, président du Syndicat d’initiative et du Comité des fêtes, et messieurs Guibert, maire, Callard, sous-préfet, Raynal, Roques, Molinié, députés et Balitrand, conseiller général. Ces festivités se termineront au parc des Sports par un concert d’Emma Calvé.
En 1923, un « prix François Fabié », concours annuel, est organisé le 12 juillet par le Syndicat d’initiative de Millau à l’Hôtel de Ville. Il s’adresse, cette année-là, aux jeunes filles de 15 à 18 ans nées ou scolarisées à Millau. Les 20 meilleures compositions furent récompensées avec un exemplaire de l’anthologie des œuvres de F. Fabié.

Ce prix va se perpétuer, passant du Syndicat d’initiative à la Société d’Etudes Millavoises qui en assure aujourd’hui son organisation.
En 2012 et 2013, le prix François Fabié s’est adressé aux élèves des écoles de la ville.

En 2012, le sujet proposé était : « apprendre, puis déclamer tout ou partie d’un ou plusieurs poèmes. Ces productions en public pouvant prendre la forme d’une simple récitation, d’une mise en scène du poème (théâtre, théâtre d’ombre, …) , d’une mise en musique (tous styles)…

En 2013, les participants ont été invités à mettre en scène et réciter le poème « Le retour du loup ».

Pour 2014, le thème retenu est celui de la Première Guerre mondiale. Les classes doivent réaliser une affiche relatant la guerre de 14-18 à travers le poème « A un vieux paysan » de F. Fabié. Neuf classes des écoles primaires et 2 classes du collège Marcel Aymard se sont inscrites.

Des membres de l’Education Nationale, de la Société d’Etudes Millavoises et des élus forment le jury qui attribue le prix François Fabié. La remise des prix aura lieu cette année dans la salle René Rieux, le jeudi 19 juin 2014 à partir de 14 h30. Les affiches réalisées seront exposées au Créa.


Prix organisé avec le soutien de la Municipalité, des Imprimeries MAURY, de l’Association « La Tortuga », de l’Association « les Adralhans » et le la Société Embal.


Voici le texte du poème proposé à l’étude cette année 2014 :

A un vieux paysan
de François FABIÉ

Ecoute, Paysan ! Tu me fus toujours cher ;
Je n’ai guère chanté que toi, tes champs, tes bêtes,
Les saisons jalonnant tes labeurs de leurs fêtes,
Et le clocher sur qui se lève ton œil clair.

Un jour j’ai pris, moi chétif, ta défense,
Contre un lourd romancier sans âme et sans essor ;
Et mes vers, décochés comme un caillou qu’on lance,
Ne l’ont pas renversé, mais on les lit encor…

Nous n’avons pas été toujours d’accord, sans doute,
Avec toi, mon ami ; j’ai dû forcer la voix
Pour te crier-en vain : « Ne détruis pas tes bois…
Ne laisse pas tes fils loucher vers la grand’route

Où passe sur son char brillant un faux Progrès
Qui peut les entraîner vers les villes lointaines ;
Il faut à tes enfants l’air qu’il faut à tes chênes,
Et la sueur de leurs bras nus sur tes guérets… »

Je te criais encor : « Debout ! Défends ta terre
Que menacent de plus en plus deux grands dangers :
La loi spoliatrice œuvre de faux bergers,
Et l’avide Teuton qui prépare la guerre !... »

La guerre ! Elle est venue, atroce et sans quartier,
A l’heure où tous nos sots la disaient abrogée ;
Et, brutale au début, par degrés enragée,
Elle dure, s’étend, gagne le monde entier.

Dès le premier appel du tambour et des cloches,
Dételant la charrue ou déposant la faux,
Ils ont bondi, tes fils, des mas et des hameaux,
Croyant la France prête et les victoires proches.

Hélas ! poitrine nue au devant des canons
Ils se sont vainement rués, fous et superbes :
Ils ont été fauchés comme ils fauchaient les herbes,
Héros obscurs, martyrs dont nul ne sait les noms…

D’autres sont accourus, car la France est prodigue
Qui sont tombés aussi,-ceux-là, du moins, vainqueurs,-
Sur la Marne, ayant fait de leurs fronts, de leurs cœurs,
De leurs bras enlacés une suprême digue.

Ils ont montré qu’ils sont ce qu’ils étaient hier,
Ce qu’ils furent toujours le long de notre histoire,
Ce qu’ils seront demain pour forcer la Victoire,
Et pour que ton vieux cœur sous ta blouse soit fier

Paysan ! car c’est toi le héros authentique,
Robuste et patient, prolifique et têtu,
De la lutte farouche où vaincra la vertu
Du sol sacré qu’on garde ou que l’on revendique ;

Toi qui par tes aînés fais le rouge labour
Du front, et par tes vieux, par ta femme et tes filles
Et tes petits derniers, frais sortis des coquilles,
L’autre labour, celui du pain de chaque jour ;

Toi qui soutiens, nourris, triomphes sans fanfare,
Souffres silencieux quand survient un revers,
Ne désespère pas, aux jours les plus amers,
- Prodigue de sueurs et de larmes avare ;

Vrai sage fait au cours varié des saisons,
Et fait au pas des bœufs qui lentement se hâtent,
Songeant sur ton sillon à ceux-là qui se battent,
Croyant à leur victoire ainsi qu’à tes moissons…

C’est pourquoi, quand luira la Paix tant désirée,
- Non quelque louche paix sans vaincus ni vainqueurs,
Qui n’aurait pour ciment que ruine et rancœurs -,
Mais la Paix triomphante, imposée, implorée,

Redresse, Paysan, ton grand corps aux abois ;
Et, montrant cette terre, un moment menacée,
Par tes fils défendue et tes morts engraissée,
Et par toi sous l’obus encore ensemencée,
Dis à tes petits-fils : « Elle est à vous trois fois !


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